La vie d'un chien errant sur les côtes indiennes ...
Je viens de l’apercevoir, en haut de la dune.
Il descend d’un pas alerte vers la plage, empruntant le tapis de corde déplié au sol pour éviter aux touristes de se brûler la plante des pieds sur le sable chaud ; le même pas que l’année dernière, je le reconnais !
Il vient avec son nécessaire de plage et le petit sac en plastique qui contient mes friandises et nourriture pour la journée …
Il ne m’a pas oublié mon copain John !
Tous les ans depuis bientôt 5 ans, John vient passer 3 mois de l’année ici à Goa pour y trouver le calme et la chaleur qui règne en maître dans cette région de l’Inde.
Nous formons un couple fidèle 3 mois de l’année et rien ne pourrait me faire manquer ce rendez-vous avec cet être extraordinaire qui m’apporte nourriture et réconfort.
La vie ici, pour un cabot comme moi, n’est pas facile ; on survit plus qu’on ne vit …
Il faut souvent se battre pour défendre sa nourriture, son coin de sable où se reposer.
Les bagarres la nuit sont fréquentes et beaucoup d’entre nous sont estropiés.
Une oreille en moins par ci, une paupière boursoufflée par-là, sans compter les nombreuses morsures et estafilades visibles sur notre pelage cachant difficilement nos côtes saillantes !
Mais la vie en a décidé ainsi et je serais vraiment injuste en disant que cette vie ne m’est pas précieuse malgré tout car la vie au grand air a des atouts et la liberté qui l’accompagne aussi.
Et quand mon « Maître » de vacances arrive, alors là, c’est vraiment chouette car je sais que, du coup, les autochtones me respecteront car protégé par un touriste leur apportant des revenus nécessaires à leur survie à eux aussi.
Arrivé à ma hauteur, il me lance un jovial « Hey my boy ! How are you ? »
Sûr que je vais bien en te voyant John !
Je frétille de la queue et pose mes deux pattes avant sur son ventre rebondi.
Il accepte avec joie mes démonstrations et continue son chemin pour aller s’allonger sur le transat qui lui est réservé ; toujours le même depuis 5 ans !
Je le suis et m’installe à ses pieds, prêt à déloger un concurrent canin qui voudrait essayer de prendre ma place près de John …
Après s’être installé confortablement, mon Maître va à la paillotte toute proche commander un jus de fruits frais, saluer le personnel et ramène à mes pieds une gamelle d’eau fraîche.
Que du bonheur !
Nos solitudes communes y trouvent du réconfort.
Moi, petit chien indien je lui apporte toute ma fidélité canine et ma présence rassurante, lui, touriste solitaire, me nourrit et me protège contre l’animosité fréquente des autres humains.
Parfois, il se sent tellement seul, qu’il me parle et me raconte sa vie là-bas en Ecosse …
Il est veuf et vit seul dans une grande bâtisse sur la lande.
Il me raconte le vent et ses bourrasques continuelles, la beauté de la lumière après une averse et ces moutons qui broutent partout insensibles semble-t-il aux changements brutaux du temps …
Ma tête posée sur les pattes avant, je l’écoute et parfois m’endort avec ces images de grands espaces balayés par un vent impétueux, gravées sur ma rétine.
Un jour, peut-être, me ramènera- t-il dans son pays pour que je le découvre et que l’on finisse notre vie ensemble ?
Qui sait ?
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